Pourquoi les paradoxes de Zénon vont au-delà de la simple division ?

Tout comme comparer les paradoxes de Zénon à une division matérielle est un faux raisonnement, comme expliqué dans l’article connexe 1, puisqu'un déplacement ne produit pas de matière, réduire les paradoxes de Zénon à un simple problème de division, c’est limiter le problème à une question spatiale et oublier le facteur capital du temps.


Si diviser un chemin ne le fait pas durer plus longtemps et ne le rend pas infini en longueur et en durée, le vrai sujet du paradoxe de la dichotomie, c'est quand on essaie de parcourir ce chemin dans le temps, morceau par morceau. Le souci n'est pas de rendre le chemin infini en longueur, mais de savoir comment terminer un trajet dans le temps en considérant que tout parcours est fait d’un début, une fin, et un milieu. Si on nie cela, c'est comme dire qu'on peut se téléporter. C’est l’ordre temporel dans lequel les moitiés doivent être traversées une à une, qui pose le défi de comment atteindre la dernière moitié restante.


Ajouter une moitié aux moitiés déjà parcourues revient simplement à incorporer une moitié à un total déjà fini d'autres moitiés, résultant toujours en un nombre fini. La véritable interrogation se pose sur la manière d'aborder un nombre infini de moitiés restantes en progressant chronologiquement, moitié après moitié. Bien que le calcul infinitésimal permette de déterminer une limite vers laquelle la somme des moitiés restantes converge vers une valeur finie, il n'explique pas comment cela se manifeste dans la progression temporelle, ni comment la dernière moitié est atteinte. Cet argument, loin de contredire Zénon, est approfondi dans l’article connexe où j’argumente que cette résolution apparente constitue en réalité un raisonnement erroné, renforçant plutôt le paradoxe au lieu de le réfuter.


Le cœur du dilemme réside dans la capacité à terminer le trajet des moitiés restantes de manière chronologique : comment franchir le cap d'un nombre illimité de moitiés restantes tout en restant dans les limites du fini ? Il est crucial de comprendre qu'un parcours ne devient pas infini du fait d'une longueur infinie, car diviser un parcours en moitiés successives ne l'allonge pas au-delà de sa mesure initiale. Selon Zénon, si un parcours semble infini, c'est dans l'exploration de l'ultracourt au sein même d'un parcours fini. L'exigence de traverser des zones médianes dans le temps nous oblige à déterminer comment ce trajet fini peut être accompli. La constatation ou le calcul de la finitude du parcours ne résout pas le mystère de la traversée de la dernière moitié restante, car, logiquement, il ne devrait pas y en avoir une telle fin. C'est là que réside l'inexplicable et le paradoxe, question qui se pose tant pour le paradoxe de la dichotomie que pour celui d'Achille et la tortue : il est nécessaire d'expliquer comment la dernière portion d'un parcours peut être franchie dans le fini.


La nécessité d'additionner une infinité de tranches pour parvenir à une conclusion définitive représente un défi mathématique insurmontable, à moins d'omettre la dimension temporelle — une omission fréquente qui conduit beaucoup à croire, à tort, que le calcul infinitésimal a résolu le problème. Comme je le démontre en détail dans mes réfutations mathématiques, cette croyance est une erreur de raisonnement.


Conclusion


Diviser un espace en une infinité de moitiés ne modifie pas sa taille globale ; l'accumulation de ces divisions aboutira toujours à un espace fini. Toutefois, l'erreur survient lorsqu'on néglige le facteur temps. C'est dans la somme des moitiés restantes et dans la question de terminer le trajet par une dernière moitié restante que le paradoxe se manifeste. Sans le temps, le paradoxe s'efface, et on pourrait faussement croire avoir résolu le problème alors qu'en réalité, le temps a simplement été omis. Il est donc crucial de ne pas oublier ce facteur temps pour éviter de succomber à une fausse impression de résolution. 


Note : un passage et non une division


En 1998, j'ai renommé le paradoxe de la dichotomie en PE/MR (Parcours Éternel des Moitiés Restantes), évitant le terme "division" qui porte à confusion. Le PE/MR met en avant la nécessité de traverser des zones médianes dans le mouvement de A à B, considérant cela comme un passage physique plutôt qu'une division mentale. Ce concept réfute l'idée d'un mouvement segmenté, promue par "dichotomie", qui suggère à tort que le mouvement pourrait être divisé ou purement intellectuel, alors que le franchissement des zones médianes est essentiellement physique. Contrairement à la dichotomie, qui semble offrir un choix philosophique de division, le PE/MR souligne le passage obligatoire dans tout déplacement, y compris le départ et l'arrivée. 


Cela s'applique aussi au célèbre paradoxe d'Achille et la tortue, où les "points antécédents" que Achille doit franchir pour rattraper la tortue ne sont pas de simples divisions arbitraires ou conceptuelles, mais des étapes physiques nécessaires. Omettre une seule moitié, c'est comme ignorer une étape cruciale, équivalent à oublier la dernière pièce d'un puzzle tout en prétendant qu'il est complet, ce qui n'est évidemment pas une approche objective.


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Olivier Dusong

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